Il y avait aussi des Français venant de la métropole. La famille Dabadie était originaire du Sud-Ouest de la France. A cause du droit d'aînesse existant à l'époque au Pays Basque, des enfants cadets s'expatriaient, la plupart vers l'Amérique su Sud.
Jean-Romain Dabadie, avait choisi l'Algérie. Il s'est marié en 1860 avec Jeanne Mercadal, une Mahonnaise d'Aïn-Taya. Il a même était élu maire de la commune.
Deux de ses descendants, que j'ai personnellement connus, avaient chacun une propriété au village de Cap Matifou.
L'un Jean Dabadie a été l'adjoint au Maire de la commune, l'autre, Alphonse Dabadie s'était retiré au village, dans une belle villa en plein centre du Cap. Tous deux avaient épousé des jeunes filles mahonnaises. Ils ont vite adopté le genre vie de leurs épouses, en s'intégrant à la population. Si j'ai voulu parler de la famille d'Alphonse Dabadie et sa femme Marie-Jeanne Fedelich c'est parce que j'ai passé toute ma jeunesse avec leurs quatre enfants, dont je garde un précieux souvenir.
On était tous à peu prés du même âge. Leur père avait acheté une auto neuve, une "Chenard et Walcker". A l'époque il n'y avait pas d'auto-école. Je me souviens d'avoir donné des leçons de conduite à Antoinette, la fille aînée.
On allait ensemble à la plage, aux bals, dans la nouvelle salle des fêtes. Le plus jeune des garçons, Ernest, était le brillant goal de l'équipe de foot d'Aïn-Taya, dont je faisais également partie. Nous étions très amis.

Depuis l'école primaire jusqu'au collège, nous avons fait nos études ensemble. Tous les deux internes au collège de Maison-Carrée, on rentrait chez nous, tous les samedis, en autobus. C'est là qu'il a fait la connaissance d'une jeune fille Pons d'Aïn-Taya , pensionnaire chez les sœurs, qui allait devenir sa femme. La guerre 1939-45 nous a séparés. Je sais qu'il a fait carrière dans la "Sûreté Nationale", comme son frère aîné Alphonse.
Georges Bichelberger était un brillant étudiant en médecine. Je j'admirais, car il était aussi un grand sportif. Champion d'Alger du 100 m nage libre, il a été un des premiers à nager cette distance sous la minute. Il était aussi un peu casse-cou. Au grand désespoir de sa mère, il avait acheté une moto puissante. C'est avec quelque appréhension que je montais derrière lui. Au cours de son service militaire, dans d'aviation, il avait obtenu son brevet de pilote d'avion de tourisme. J'ai été son premier passager.
Je me souviens du jour où il m'a amené à l'aéroport de Maison-Blanche. Sur un petit avion Caudron–Renault j'ai reçu mon baptême de l'air en survolant la côte de la Méditerranée et mon petit village. Comme nous volions sur le Cap à une faible altitude, les habitants sont sortis de leur maison pour nous saluer. C'étaient les débuts de l'aviation. Les voyages par air entre la France et l'Algérie n'existaient pas encore. Aussi, j'étais fier de mon exploit. Je mesure aujourd'hui avec quelle insouciance j'avais confié ma vie à un pilote novice!