Mon ancienne voiture ayant rendu l’âme, j’achetais une conduite intérieure Peugeot avec démarreur, freins avant, bras de signalisation, phares, codes etc. Elle était assez moderne mais ne dépassait pas la vitesse de 70 km par heure.
Avec mes amis Amédée Périano et les frères Dabadie, nous allions dans les bals à Ain-Taya, à Fort de l’Eau et parfois jusqu’à Birkadem un autre village mahonnais.
On y rencontrait une bande de jeunes filles sympathiques. C'est avec elles que j'ai osé faire mes premiers pas de danse.
Je me souviens surtout de Germaine Humbert, une petite blonde et ses cousines les sœurs Sintes. Dans la bande il y avait aussi de jeunes garçons, Jojo Sintes, et son camarade Lavallée.
Enfin je remarquais une grande blonde, un peu plus âgée que moi : Viviane Jover qui habitait le village voisin de Saoula.
Je ne me doutais pas que quelques années plus tard, des liens plus étroits me lieraient avec la famille Jover, par mon neveu Jean-Luc et la fille de Viviane : Brigitte.
Au cours de l'année 1936, la France va connaître de nouveau de fortes tensions politiques. Les journaux algériens et en particulier l'Echo d'Alger, La Dépêche Algérienne et Alger Républicain vont relater avec des gros titres ces événements : grèves, défilés, manifestations. A la suite des élections, c'est l'avènement du front populaire qui donne aux travailleurs la semaine de 40 heures et quinze jours de congés payés. J'ai pris sans trop d'enthousiasme mon premier congé, car au Cap, avec son climat et ses plages c'était comme si on était toujours en vacances !

En Europe, des dictatures s'installent. A la radio on entend les discours belliqueux des dirigeants. Les journaux nous rapportent en gros titres ces événements. La presse française se déchaîne, exprimant les idées politiques des partis.
La commune du Cap n’échappe pas à ce climat agité. Dans les cafés on discute politique.
La guerre fratricide d’Espagne est ressentie douloureusement par les anciens.
Mais nous, les jeunes, nous sommes plus préoccupés par les menaces de guerre et notre possible mobilisation.
Cela n'empêche pas les grandes fêtes annuelles de se dérouler joyeusement, comme d'habitude, au mois de juillet 1939, avec la retraite aux flambeaux, la fête foraine et le grand bal. Comme c'est la coutume, le maire entre au bal salué par une vibrante Marseillaise, spontanément, deux haies de spectateurs se forment pour l'accueillir d'un côté des bras tendus du salut fasciste et de l'autre les poings levés des communistes.